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3  AMERICAS   BY   BICYCLE

MES VOYAGES AUX TROIS AMERIQUES EN VELO

LA COTE CHILIENNE centre

1) Qui suis-je, où vais-je, et dans quels états j’erre

Je suis parti seul le 1er Octobre de Buenos Aires, pour aller à Lujan, puis Tandil, la sierra de la Ventana, Bahia Blanca, Neuquen et Zappala par la route 22, les Primeros Pinos, et tous les lacs andins, proches de Alumine, Junin de los Andes, San Martin de los Andes, Villa Angostura, Bariloche, El Bolson, Cholila et Trevelin. Puis je suis passé au Chili . Là j’ai un peu parcouru la caretera austale, de Feutaleufu Chaiten. Puis je suis passé à la péninsule de Chiloé. Ensuite j’ai rejoint Puerto Montte, et je suis remonté vers le Nord, jusqu’à La Serena, porte du désert, en restant entre l’autoroute n°5 et la côte pacifique, et en formant de multiples zig-zag.

J’avais une bicyclette européenne, une hibryde ou VTC, de marque MBK. Le cadre est en aluminium 2005, avec suspensions avant, 24 vitesses, pignons arrière 11-32, et plateaux avant 24-32-42. Elle pèse tout équipé 14kg. J’avais 25kg de bagages, avec une tente, le matelas, le butagaz, le sac de couchage, etc…, ainsi que 4 litres d’eau et à manger pour 24h. En plus je transporte toujours ma mandoline avec les partitions, et une méthode de langue. Tout le poids est situé dans les sacoches avant, et tout l’encombrant à l’arrière.

J’aurai mieux fait de venir avec un VTT, car je ne trouvais plus ni pneux, ni chambres à air, ni rayons. Et en plus, sur les pistes, la jante arrière coupait le pneu. J’ai don dû laisser tomber l’idée d’aller àUshuaia.

Je fais 50 à 100km par jour, selon le vent, le maître des lieux ici, de l’état de la route, piste ou goudron, des cotes, et de la prochaine halte possible.

Je vais lentement, pour respecter le corps, et apprécier le paysage, les villes, les sites naturels, et parler avec les gens. C’est ma formule magique, slow life.

Tout le long de ce voyage, les conducteurs m’encouragèrent de la main ou en klaxonnant, et furent très prudents envers moi. Les habitants furent très aimables avec moi, parlant facilement, s’intéressant, et me donnant volontiers un coup de main ou un renseignement. Bon il est vrai que j’ai appris l’espagnol avant de venir, et ça aide. Et les chiens argentins sont très tanquilles , comme les argentins d’ailleurs : ils dorment le long de la route. Les chiens chiliens sont plus agressifs, mais ils sont attachés ou derrière des grilles.

Tout le long de ce voyage, j’ai été en contact, via internet, avec des cyclistes argentins, chiliens, urugayens et brésiliens. J’ai en effet eu l’idée de raconter, 2 fois par semaine, mon voyage, c’est à dire surtout de décrire les paysages et villes que je découvrais, en espagnol, à mes amis, et aussi à des listes Yahoo de cyclistes, pour partager mon plaisir. Et le long du chemin, je donnais le CDRom de mes voyages précedents en vélo, et de celui-ci, photos et textes, aux gens qui me donnaient un cooup de main, ou avec qui je passais un moment agréable, en remerciement.

A la fin de mon voyage, avant de quitter les Amériques, j’ai organisé tout mon texte avec Word, et traité toutes mes photos avec Photoshop, puis je les ai numérotées et titrées. Ensuite j’ai confié des copies du CDRom à des cyclistes de plusieurs pays d’Amérique du Sud, afin qu’ils le distribuent gratuitement à toute personne interessée, afin de faire connaître la beauté de ces pays, et la joie du vélo.

2) 3100 km au CHILI

Je suis entré au Chili à Feutaleufu, dans l’intention de parcourir la carretera austral n°7, mais ce fut impossible avec un VTC. Je ne trouvais plus de pneus et chambres à air, et la jante arrière coupait le pneu, sur les pistes. Alors j’ai choisi de monter vers le Nord du Chili, jusqu’à la porte du désert, la ville de la Serena, en restant entre l’autoroute, c’est à dire la Panaméricaine, sans jamais l’emprunter, et la côte, en un parcours en zig-zag. Je me suis logé chez l’habitant. Dans tous les villages il y a une famille qui loue des chambres et fait demi-pension, pour 10 a 18 dollars par jour, il suffit de demander. Et la carte routière est vendue par les stations-service COPEC.

Peu avant Noël 2004, j’ai quitté Trevelin (Argentine). J’ai suivi le Rio Grande, sur une piste de ripio – le ripio est un mélange de graviers de toutes tailles, de la grosse pierre à la poussière, et de terre, tassé et arrasé au bull-dozer. L’avantage est que ça ne se transforme pas en boue quand il pleut – La route monte doucement, ce serait sans effort s’il n’y avait le vent de Patagonie, le mistral local, toujours de face bien entendu, et la bruine, l’humidité Andine, froide et pénétrante. Ce vent vient des glaciers, se charge d’humidité en passant sur les lacs nourris par ces mêmes glaciers, s’engouffre dns les vallées et file vers la mer, traversant le plateau désertique de la meseta, sans rencontrer aucun obstacle. Il ne cesse pour ainsi dire jamais.

A la frontière je dévore mes provisions, fromage, jambon, fruits, saucissons, car il est interdit de passer tout cela au Chili, par mesure de protection écologique des cultures et de la forêt. Le col est bas, 1800m environ. Ensuite ce fut la descente folle, jusqu’au niveau de la mer, en 50km. Le paysage et la route changent du tout au tout. Je suis entré au Chili, le pays des mille collines, appelée Cordillera. La route monte, très raide, presque sans virage, sans plat, franchit la colline, et redescent au niveau de la mer à toute vitesse. Après une très courte vallée, vient une autre colline à franchir. Durant mon parcours au Chili, je n’ai connu que 500km de plat.

Le Chili est fabuleux, car comme c’est un pays tout en longueur, tous les jours le paysage est différent. Je suis entré au niveau de la Péninsule de Chiloé là où règne la Selva, la forêt humide impénétrable. Les arbres croissent partout, collés les uns contre les autres, accrochés aux rochers, aux falaises, aux pentes abruptes. Pas un espace n’est vide, tout est sauvage, verdure, bois, myrthes (rines), maitenes aux feuilles argentées et aux troncs de chênes, arayanas aux troncs rouges écorcés, cohihues altiers aux petites feuilles, cannes de colihués, genets. Et la moindre vallée se transforme en marais, tout aussi envahis d’arbustes, myrthes aux troncs noirs et ajoncs. Les maisons des villages sont entièrement en bois, avec les murs en planches ou en tuiles de bois, et les villages sont isolés dans la selva, entourés de quelques paturages .

La route saute d’un torrent à un autre, passe tout près d’un glacier, longe des lacs immenses, rejoint un fjord, et remonte dans la selva.

A Chaiten, j’ai pris le ferry pour rejoindre la péninsule de Chiloe. Chiloe est déjà un peu plus au Nord, et le paysage évolue. Rappelez vous que le froid est au Sud, et le désert au Nord. La selva est toujours là, mais l’être humain a gagné de nombreux paturages, et a implanté des villages. Chiloé fut longtemps la terre chrétienne la plus éloignée, la fin de la route n°5, la mythique panaméricaine. Aussi de nombreuses églises y ont été construites, toujours en bois.

La route traverse forêts et paturages, rejoint un village, un port près d’un fjord. Et le pacifique est là-bas, au fond du fjord, à des kilomètres. Notament le port de Castro est construit entièrement sur pilotis, tellement la colline monte abrupte au Chili.

Vient ensuite la colonie allemande, Puerto Montte, Frutillar, Puerto Octay, Osorno, et le lac Llanquaue. Ce lac est le plus grand du Chili, une mer intérieure. Ici tout le paysage est organisé par l’être humain, en bocages et forêts. Les fermes sont entourées de parcs d’arbres et de fleurs, arbres natifs précités, et aussi arbres européens, chênes, tilleuls, bouleaux, pins et sapins, peupliers, hêtres. Les bords des routes sont fleuris et plantés d’arbustes. Les temples et églises jalonnent le chemin. Bien sur, tout est toujours en bois. C’est le jardin d’eden européen, fabriqué par l’être humain. Je me suis crû en Europe, vers 1950, avant l’ère de la consomation à outrance. Et au fond s’éléve le volcan Osorno, le géant blanc.

Et peu à peu les Andes prennent de l’altitude, et les collines aussi. De 500m à Chiloé, elles dépasseront 2000m à la Serena. Et les cotes s’allongent, et atteindront 15km, parcourues sur le plus petit braquet, à 7km/h, pur exercice de patience et d’endurance. Mettez votre main 10cm au dessus d’une table, et posez les doigts écartés sur la table. La paume, cest les Andes, et chaque doigt une colline de la Cordillera, perpendiculaire à la mer.

Puis le paysage change. Alternent forêts de maitenes et d’eucalyptus, cultivés pour la pâte à papier, et prairies ou champs de blé ou de maïs bordés d’arbres. La route est bordée de mimosas, genêts et maitenes. Ce paysage m’accompagnera jusqu’à 70km avant Curico. Il est entrecoupé de forêts de pins de l’Oregon, de forêts originelles, de lacs de barrage entourés de collines basses. Et les estuaires sont des deltas marécageux. La côte est une succession de falaises, et de baies en arc de cercle, sablonneuses ou hérissées de récifs, sur lesquels se fracassent les vagues dans un nuage d’embruns.

Les villes ont beaucoup souffert des tremblements de terre et des raz de marée, qui ont démolis la plupart des centres anciens. Il reste quelques maisons de bois avec grand balcon et décorations en dentelle de bois, et quelques édifices art déco. Quelques monuments modernes valent le détour, comme la cathédrale d’Osorno.

Mais surtout visitez Constitucion, où le centre ancien est formé de maisons basses, d’un étage, chacune peinte d’une couleur différente. Toutes sont de style art déco, art nouveau, ou classique, avec des moulures autour des fenêtres, des portes et sous les toits, ou de fausses colonnes, de statuettes. La promenade le long du fleuve est splendide, car celui-ci est large, majestueux, et la berge en face est déjà la forêt. C’est l’ancien port fluvial, et des barges attendent toujours, amarrées, couvertes d’un toit de tissu. La côte de Constitucion est une suite de petites plages au pied des falaises, séparées par des rocs énormes battus, creusés et sculptés par la mer et le vent, qui servent de refuge aux oiseaux.

Soudain tout se métamorphose, les collines se couvrent d’acacias et rines, et le sol se fait pierreux. Je vois mes premiers cactus. Et en contraste, les larges vallées, irriguées, sont entièrement cultivées, blé, maîs, fruits, vignes, avocats, tout pousse à profusion. Je suis dans le verger de Santiago, Rancagua, Santa Cruz. Bien sur, j’ai fait un détour pour voir les lacs Verchuquen et Rapel, le premier entouré de bois, le second de collines semi-désertiques.

Et je suis arrivé à Santiago, par la voie de service qui longe l’autoroute. Cette voie est une petite route utilisée pour la desserte locale et les bus, qui commence 30km au Sud de Santiago, traverse la ville, et se poursuit 30km plus au Nord. C’est impeccable. Un cycliste m’y a conduit.

Ici les cyclistes roulent souvent sur ces voies de service, ou sur les bandes d’arrêt d’urgence des autoroutes. C’est moins dangereux que de traverser les villes, où les bus et les voitures roulent sans se préoccuper des cyclistes, et cela permet d’éviter les bidonvilles. Faites comme eux, pour entrer et sortir des villes, ou pour les contourner.

Le centre de Santiago a été sauvé de justesse grâce au tourisme, et de nombreux édifices et bâtiments du début du 20me siècle sont maintenant protégés et réhabilités.

Après Santiago commence le véritable paysage semi-aride, avec ses collines pierreuses couvertes de petits acacias et de grands cactus.

Valparaiso est magnifique, entièrement construite sur des collines, en un dédale de petites rues et de maisons basses de toutes les couleurs, face à la mer. On croirait voir un tableau pointilliste, formé de tâches de couleurs. La plus grande partie de la ville date du début du 20me siècle.

Et puis j’ai parcouru la côte à nouveau, avec ses baies de sable, ses récifs, et ses versants boisés, pour atteindre la piste qui mène par l’intérieur à la Serena. Là ils n’avaient jamais vu un touriste en vélo. Le paysage est digne d’un film de western. Les acacias se font plus rares, et les cactus plus nombreux. Puis eux-mêmes s’éclaicissent, et il ne reste que des touffes d’herbes sèches. Et incroyable, quelques fermes et villages survivent, par miracle, tous les 30km. Le chemin utilise l’ancienne voie de chemin de fer à une voie. La traversée des 5 tunnels est impressionante, ainsi que les 8 cols à 1500-2000m d’altitude. Et partout, du sable, des cactus, des pierres et des touffes d’herbes. Les rivières sont à sec. Chaque tunnel, chaque col est une victoire personnelle. Le paysage est fou, incompréhensible. Ce fut la partie la plus merveilleuse de mon voyage.

La Serena est parfaite pour se reposer. Dans cette petite ville de style art nouveau, les voitures roulent doucement, et s’arrêtent pour laisser passer les piétons et cyclistes. Ce fut la seule fois en 6 mois! A 8km le port de Coquimbo, de même style, vaut le détour, avec sa promenade en bateau pour voir les lions de mer et les oiseaux, ses restaurants de poissons, son quartier ancien, ses collines.

Ensuite je me suis lancé à l’assault du col routier le plus haut de l’Amérique du Sud, celui d’Agua Negra, 4760m d’altitude, 150km de pistes, ce sera l’objet de l’article suivant.

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